c'est ça, la guerre

Publié le par céline

Cela faisait bien quinze jours qu’on était perdus dans ces montagnes. Bien sûr, si nous n’avions pas égaré la carte, à l’heure qu’il était, nous aurions déjà dû nous retrouver au camp, avec toute la garnison. Mais le général nous avait prévenu : si nous rentrions sans avoir exécuté la mission, c’était la fin. Evidemment, toutes les autres unités avaient fini le boulot, sauf nous. D’ailleurs, notre chef désespérait :
-Il suffirait juste que vous réussissiez votre mission, pour une fois, afin de nous tirer du déshonneur.
Notre mission. Et quelle mission ! Elle consistait en l’attaque d’un village près des lignes ennemies, et en sa destruction. Peu importe le moyen employé, nous devions le détruire. Rien de plus simple : c’est ça, la guerre !
            Le gars de la reconnaissance cria soudain : « j’aperçois enfin ce fichu village ! »
Nous allâmes voir : en effet, c’était un petit bourg, perdu entre deux forêts de conifères, exactement comme on nous l’avait décrit. Le chef nous rassemble, et déclara :
-Nous allons enfin attaquer ce fichu village, et prouver à tous que nous sommes dignes de confiance. Nous irons, mes braves, comme l’ont déjà fait nos prédécesseurs, et nous vaincrons. Nous tuerons, pillerons : pas de quartier ! Après tout, c’est ça, la guerre !
            Nous l’approuvâmes, puis nous astiquâmes nos armes, et revêtîmes notre bel uniforme bleu. Finalement, nous allions avoir la gloire. Certes, c’était notre devoir que nous allions accomplir, mais nous le ferions avec tant d’éclat que tous nous admireraient.
Nous étions si fiers ! Les soldats blaguaient, souriaient, Jules sifflotait la Marseillaise, pour nous donner du courage…Et nous pensions tous : après tant de honte, la lumière, enfin…
            Une fois les préparatifs achevés, nous arrivâmes au village. Etonnant, pas de cris, pas de panique. Nous nous regroupâmes sur la place centrale, dans un silence pesant. Les habitants nous entouraient, en nous regardant curieusement, sans peur, vraisemblablement…
C’est vrai que nous n’avions pas l’air de soldats : nous étions sales, défaits, fatigués, et puis nous étions les ratés de l’armée. Mais quand même, nous dérespecter de la sorte !
             Notre chef ne perdit pas la face, et hurla :
-          A L’ATTAQUE !
Et nous attaquâmes. Nous détruisîmes tout, nous massacrâmes les habitants. Ils nous avaient méprisés, ils allaient payer. Ce fut un carnage, dans ce paisible petit village. Mais c’est ça, la guerre !
      Après notre hécatombe, nous quittâmes les lieux, hautains. Nous avions réussi, dans la gloire, et nos instincts primitifs de tueurs –comme disait le chef- étaient calmés. Nous déambulions dans le village, devant l’école, la Poste, l’épicerie, l’église, la mairie…
Au fronton de la mairie, un drapeau familier attira notre attention, et nous mit mal à l'aise. Même s’il était maculé de sang, on arrivait quand même à distinguer du blanc, du bleu, et puis aussi du rouge…
 
Et toujours, en toutes circonstances, la chanson du jour: allons enfants de la patrieeeeeeeeee ^^
 

Publié dans vivons heureux

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